17 mai 1994
Né à l’hôpital de Furano à Hokkaido, au japon. On me nomma Satsuki, en l’honneur de Satsuki Katayama, amie de la famille. S’écrit avec le symbole du sable et de la lune. Je suis né dans une famille plutôt aisée, pas très chaleureuse. Mes parents étaient occupés avec le travail, et j’appris très tôt à faire de même pour mes études et la vie en général. Le succès est garant de l’avenir, et seules les transactions financières importantes et les promotions sont signes de fête et de réunion dans la famille.

17 mai 2004
Je suis au collège, déjà, à l’âge de dix ans. Il se trouve que je suis plutôt brillant, et qu’on me fit sauter quelques classes pour ajuster mon niveau. Outre cela, mon enfance est plutôt calme, quoique j’aie tendance à lire en classe plutôt que d’écouter les professeurs, qui m’ennuient avec des sujets desquels je connais déjà les réponses.

17 mai 2010
Mes parents me paient des études dans une grande université américaine, là où se trouvent plusieurs professeurs reconnus de mon domaine de choix. J’ai seize ans et je quitte ma famille pour m’installer en résidence. Il va s’en dire que mon anglais s’améliore drastiquement et rapidement.

17 mai 2011
Échange de correspondances avec mes parents, quelques décès dans la famille suite au tsunami, mais je n’ai pas le temps de quitter les États-Unis. De toute manière, ils sont morts, je ne peux rien pour eux. Le sujet de mes études est passionnant, voir enivrant, et j’ai du mal à quitter les salles de cours, où je parle avec les professeurs. Je sens qu’ils n’ont plus grand-chose à m’apprendre, et commencerai mes propres recherches l’an prochain.

17 mai 2013
Graduation de l’université. On me propose un poste intéressant chez LOD dès que j’eu ma maîtrise en main. C’est une compagnie qui n’a pas encore fait sa place dans le monde, et je compte bien grandir avec elle. Je déménage aussitôt à Flagstaff, dans le nouveau laboratoire de la compagnie. Les heures sont longues, mais je me sens à ma place.

17 mai 2014
Je rencontre la plus belle femme du monde. Je l’aime, je crois. Je ne sais pas trop, je suis trop prit par le travail. Je crois qu’elle m’aime. Nous vivons ensemble en tout cas, elle semble être sous mon charme. Je suis incapable d’accepter de partager son attention.
17 mai 2016
Naissance d‘Amerawdwr. Je ne tenais pas à avoir un enfant, mais c’est son corps à elle après tout, elle fait ce qu’elle veut. Elle s’occupe du bébé. Elle est douée. Je me sens dépassé. Pourquoi est-ce que je ne suis pas capable de l’aimer? Elle est belle, et il me la vole. C’est comme s’il me devait quelque chose, qu’il devait me prouver qu’il mérite que je lui cède cette attention qu’elle lui donne. Et la mienne. Un étau me comprime la poitrine lorsque je le prends dans mes bras, m’étouffant. Je rencontre Irina Gordoïevna, une russe, qui deviendra rapidement mon amante.

17 mai 2018
Naissance de Mikaïl. Je quitte Hélène pour aller vivre avec ma nouvelle femme et son fils. Je n’étais plus capable de vivre avec le malaise. Je ne referai pas la même chose avec celui-là; je tâcherai de m’éloigner et de simplement lui donner ce dont il a besoin, un modèle à suivre. Je me jette dans mon travail, une douce lobotomie qui me fait oublier mes problèmes familiaux. Mes talents et ma détermination ne restent pas inaperçus.

17 mai 2021
Irina me reproche ma froideur, et découvre durant l’année qu’elle était ma maitresse et que j’ai un autre enfant. Elle me met dehors. Je suis transféré au quartier Général de LOD à Cleyfield; ses quelques années passées à son crochet m’auront permis de faire faire un bond majestueux à ma carrière.

17 mai 2033
Amerawdwr s‘est inscrit dans la milice de LOD, et je n’ai pu cacher ma déception. J’aurais tant voulu qu’il puisse suivre mes traces. Il aurait pu poursuivre ses études, au lieu de se prendre pour une brute. Il a l’air ridicule dans son uniforme trop grand pour lui. J’espère qu’ils lui feront assez peur à l’entrainement pour qu’il retourne chez sa mère, en sécurité. Je ne sais pas quoi lui dire. Je n’ai jamais été là pour lui, à quoi est-ce qu’il s’attend? Je ne suis pas assez idiot pour ne pas comprendre qu’il veut me parler, mais je n’ai rien à lui dire. J’ai du travail, et lui aussi.

17 mai 2034
Un nouveau virus grippal est apparu. Cette fois ci, je suis mis en charge de l’équipe qui mettra au point le vaccin qui vaincra le virus. Le travail est long, mais c’est une occasion en or –au même titre que toutes les autres. Ma réputation n’est pas vraiment à faire, et aucun virus ne me résiste bien longtemps. Ou, du moins, c’est ce que je pensais. Nous pensions avoir réussis, mais il semblerait que le virus ait muté plus rapidement que nous le pensions et ait apprit à surmonter les anticorps que nous avons développés. Les réactions sont de plus en plus violentes, et en quelques mois le chaos règne sur le monde. Pendant ce temps, je reste selon certains «confortablement» dans la sécurité de mon laboratoire. Je travaille nuit et jour afin de trouver un antidote à cette maladie qui affecte beaucoup trop de gens, selon les dires de ceux qui prennent le temps d’écouter les nouvelles.

Ils l’ont ramené, en après-midi. Il était en sale état. Il aurait dû m’écouter et retourner à Flagstaff. Ou lui avait-je parlé, en fait? Je ne me souviens pas, j’étais occupé. Il était mal en point, en tout cas. Mais juste mal en point, et ça c’était assez pour relever du miracle. Il y avait longtemps que je n’avais pas senti l’étau aussi fort. Ils lui ont replacé le bras. Je n’étais pas là; j’étais occupé ailleurs. En train de prélever des échantillons sur des cadavres, entre autres. Et de penser à ce qu’il allait lui dire lorsqu’il se réveillerait. Enfant, il avait toujours été émotif. Comment lui annoncer qu’à l’extérieur, c’était la fin du monde? J’ai pensé déléguer cette tâche à une de mes assistantes. Mais, quelque part, je voulais que le tout soit productif. Simple. Tirer d’un coup sec, peut-être, le ramènerait sur terre.

Alors je suis allé le voir à son réveil. J’avais l’impression de suffoquer. Je pouvais faire cette chose-là correctement, pour lui. Après tout, c’était comme ma réflexion dans un miroir. Une réflexion que j’aurais raté, mais cette erreur ne pouvait être seulement de sa faute. Je parlai avec un ton plus mécanique et froid que voulu, peut-être. Mais je voulais être certain qu’il ne lui reste plus d’espoir. Qu’il abandonne. Qu’il se consacre à quelque chose de rationnel.

Alors, je lui ai annoncé que toute sa famille était morte. Sa mère, ses frères, ses sœurs. Certains tués par les autres. Je lui annonçai la mauvaise nouvelle, comme ça, pour être certain qu’elle reste bien imprimée dans sa mémoire. Pour être certain de briser sa volonté. Parce que le reste du monde avait plus besoin de lui que sa famille. Enfin, son existence ne me semblait plus être un fardeau.

17 mai 2036
Cela fait deux ans déjà que nous travaillons à développer l’antidote au virus V1LOD5. Deux ans que nous retirons leur sang à nos cobayes à tous les jours, où nous travaillons plus que nous ne vivons, deux ans que nos cobayes meurent avant que nous puissions avoir des résultats concluants. Outre Amerawdwr, ils meurent tous. Depuis qu’il est devenu mon sujet d’étude, je n’ai plus de problème. Ce n’est plus mon fils, ou même un être vivant; c’est un outil qui me permettra de trouver le vaccin. Certains disent que je n’ai pas de cœur. Vraiment.

En quoi serait-il juste de le placer, lui, cet être qui n’est utile en rien, dans un état de liberté qui ne peut que nuire à long-terme à la société? Je travaille sans relâche. Nous trouverons l’antidote –et là, il sera bien libre de vivre sa vie. Mais pour le moment, elle m’appartient.
17 mai 2038
Enfin, quatre années de travail. Ce n’est pas encore parfait, ce n’est pas encore réussi, mais nous avons quelque chose. Peu importe ce que le département d’éthique dira, cela en valait largement la peine. Les morts ne seront pas morts en vain. Ils seraient morts d’une manière ou d’une autre, sans nous. Ils l’ont fait pour le bien de tous. C’est grâce à Amerawdwr, mais aussi à Xiao et Élizabeth. Ils ne sont peut-être pas immunisés au virus, mais la tolérance de leur corps face à l’exposition est épatante. Si seulement ils pouvaient voir ce qu’ils ont fait. Mais nous ne pouvons arrêter maintenant. L’antidote n’est que temporaire, et très volatile. Nous nous sommes assuré que les gens n’oublient pas de prendre leur dose. C’est drastique, mais le résultat est ce qui importe. Nous ne voulons pas d’infecté à l’intérieur des murs.

Nous sommes si près de la solution, je le sens. Et par «nous», j’entends moi, pas ces imbéciles qui me servent d’assistants.

17 mai 2039
Les enfoirés. Voilà déjà plusieurs semaines qu’ils sont partis avec eux. Surgis de nulle part. Terroristes à la con. Ils ne sont pas d’accord avec ce que nous faisons. Sales ingrats. Je dois retrouver mes cobayes. Sans eux, les recherches avancent à pas de tortue; tous les autres ne font que mourir après tout au plus quelques jours. C’est trop peu pour nous laisser le temps de voir l’effet des différentes solutions sur les cellules.

Plus on attend avant de me redonner mes sujets, plus de gens se feront dévorer par des saloperies. Et à dire vrai, je m’en moque. Cette découverte sera la mienne, et pas celle d’un groupe extrémiste qui mord la main qui le nourri. Cela me rend fou, de rester dans ce labo à faire des tests qui ne sont jamais concluants. Je ne sors pas. C’est ici qu’est ma place.

Mais si ça continue, c’est à l’extérieur que je ferai mes recherches.